Quand Détroit lorgne Alger : la grande offensive d’APTIV sur l’industrie automobile algérienne
À l’heure où les économies du Sud cherchent à redessiner leur avenir industriel, un événement discret mais lourd de sens vient secouer la scène économique algérienne. APTIV, mastodonte américain de l’équipement automobile, s’apprête à poser ses valises en Algérie. Objectif : y implanter une usine de fabrication de faisceaux de câbles, nerfs invisibles des voitures modernes. Un pari audacieux qui pourrait bien marquer le début d’un tournant historique pour le pays.
Une rencontre stratégique, un symbole fort
Dans les couloirs feutrés du ministère de l’Industrie, à Alger, une rencontre a récemment scellé les prémices d’un partenariat qui pourrait bouleverser le paysage industriel algérien. Le ministre Sifi Ghrieb a reçu une délégation d’APTIV pour discuter d’un projet d’usine en partenariat avec un industriel local. Le message est clair : l’Algérie veut rompre avec le modèle de l’importation à outrance, et amorcer une montée en gamme industrielle.
De l’assemblage à la souveraineté industrielle
L’histoire de l’automobile en Algérie a longtemps été une succession de demi-promesses : usines d’assemblage semi-montées, dépendance chronique aux pièces importées, et un marché sous perfusion. Mais depuis peu, les lignes bougent. Treize géants mondiaux seraient en pourparlers pour investir dans le pays. Hyundai, le Sud-Coréen, a déjà signé un protocole d’accord. L’effet domino semble enclenché.
Pourquoi les faisceaux de câbles ?
Le choix d’APTIV n’est pas anodin. Les faisceaux électriques sont le système nerveux des véhicules modernes : ils relient les capteurs, gèrent l’électronique, assurent sécurité et connectivité. Ce segment, en pleine expansion avec l’électrification du parc mondial, représente un maillon stratégique dans la chaîne de valeur automobile. APTIV, qui fournit des géants comme GM, Tesla ou BMW, ne vient pas juste pour assembler — il vient pour former, structurer, ancrer.
Un levier pour l’emploi et la formation
Ce projet pourrait générer des centaines, voire des milliers d’emplois directs et indirects. Mieux encore, il pourrait catalyser la création d’une main-d’œuvre qualifiée, dans un pays où plus de 30 % des jeunes diplômés peinent à trouver un emploi stable. Les écoles d’ingénieurs algériennes, dont la qualité est saluée mais sous-exploitée, pourraient enfin jouer un rôle stratégique dans une filière de pointe.
Vers une “Detroit du Maghreb” ?
Cette ambition industrielle n’est pas sans rappeler le boom qu’a connu le Maroc avec Renault à Tanger ou la Turquie avec Ford Otosan. Mais l’Algérie veut aller plus loin : ne pas se contenter d’être un atelier du monde, mais devenir un acteur autonome, capable de produire, exporter, innover. APTIV pourrait en être le déclencheur.
Reste à transformer l’essai
Rien n’est encore signé. Mais l’entrée en jeu d’un géant comme APTIV dans le jeu industriel algérien, couplée à la volonté affichée de structurer une filière nationale, donne des raisons d’espérer. À condition que l’administration suive, que les infrastructures soient prêtes, et que la volonté politique tienne le cap.
L’avenir dira si cette page industrielle en gestation sera écrite avec de l’encre durable… ou effacée par les vents du court terme.
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